A défaut de se lancer dans l’aventure « touloulou », nous avons trouvé une alternative intéressante pour nous imprégner de l’ambiance des bals paré-masqués : le village Nana.
Au fil du temps, les quelques camions postés en face de l’entrée du célèbre dancing « chez Nana » se sont étoffés pour répondre à une nouvelle clientèle : celle des curieux du bal paré-masqué.
Aujourd’hui c’est l’ensemble de la rue du dancing qui est bloquée le temps du bal, tous les samedis du carnaval de 18h à 6h du matin. De nombreux bars éphémères avec tables et chaises offrent boissons et nourriture, pour tous les badauds attirés par la magie du carnaval, mais qui n’osent franchir la porte du dancing.
Alors que nous nous dirigeons vers l’entrée du « village », nous croisons notre première touloulou, qui, devant notre regard plein d’émerveillement consent à nous faire un signe de la main.
Après avoir fait un rapide tour dans l’unique allée du « village », nous nous postons devant l’abord du « soleil levant » et notre regard ne se détachera plus de ce spectacle.
Il y a d’abord les entrées discrètes et solitaires que l’on imagine être celles des habituées du carnaval. La démarche énergique et déterminée, ces touloulous semblent se livrer à une double vie, celle de la femme fatale qui, le temps d’une nuit, s’extrait de son quotidien bien rangé.
Puis il y a les arrivées plus massives, le groupe d’amies déjà bien exaltées par leur pré-soirée et qui se prennent au jeu du personnage de « touloulou ». Entraînées par une foule d’admirateurs qui les accueillent, elles se mettent en spectacle, se font prendre en photo, se font remarquer par quelques gestes provocateurs.
Alors que les touloulou rivalisent de raffinement, nous avons, à l’inverse, été surpris par le manque d’élégance de leurs futurs cavaliers, habillés en simple t-shirt et pantalon de toile.
Au fur et à mesure que le temps passe, la queue des carnavaliers se fait de plus en plus dense pour ne former qu’une file ininterrompue de danseurs. Entraînés par les sonorités de l’orchestre que l’on entend de l’extérieur, les corps commencent déjà à se déhancher et prennent le rythme de la musique de carnaval. Même pour les badauds, il devient difficile de se réfréner.
Parmi les curieux, nous avons été marqués par un groupe d’anciens, que la mairie avait collé en première loge du dancing. A l’abri sous une tente et protégés par des barrières, ils pouvaient revivre à l’envie le carnaval de leur jeunesse. Certaines personnes âgées étaient même déguisées en « touloulou ». Aidées par leur mari, elles sont restées debout pendant un long moment. A côté, quelques personnes se servaient sans scrupule du déambulateur d’un de leur congénère pour stocker leurs boissons. Devant nous, la tête de quelques enfants aux regards endormis dépassait de la ligne régulière de la foule. Juchés sur les épaules de leurs parents, ils donnaient l’impression d’être déjà mis en condition, comme initiés à leurs futures conditions de carnavaliers.
Nous sommes restés deux heures plantés devant ce décor incroyable, fascinés par cette ambiance à la fois magique et mystérieuse, frustrés de ne pas arriver à vaincre notre peur du ridicule. Non, nous ne nous sentons pas encore prêts pour entrer dans l’arène…