Où on se prend à rêver à survoler la Canopée
L’intrigue du deuxième roman policier de Colin Niel continue de se dérouler en Guyane, qui semble être une terre de prédilection voire de cœur de l’auteur.
Cette fois-ci, nous pénétrons en plein cœur de la forêt tropicale, alors que pour son roman « les hamacs de carton », nous étions restés cantonnés au littoral et dans les villages noirs-marrons en bordure des fleuves.
Le style s’est nettement amélioré, on sent que l’auteur a l’expérience des séjours en forêts tropicales pour décrire aussi bien l’ambiance singulière des sous-bois et nous dévoiler tous les petits trucs à savoir pour survivre dans un milieu dit « hostile ». On est même un peu déçu, car, finalement, on apprend que le principal danger en forêt est de se perdre…
L’histoire démarre au camp « Japigny », station scientifique appartenant au CNRS, dont on suppose qu’il est situé dans la réserve naturelle des Nouragues. Ce camp existe réellement et le site internet de la station scientifique des Nouragues regorge de détails les plus croustillants sur les règles et conditions de vie dans la station. On y découvre aussi que : « la mission de la station de recherche des Nouragues est de promouvoir la recherche scientifique en forêt tropicale humide, dans un site aussi éloigné que possible de l’influence directe des activités humaines ». En effet, il faut 6h à 8h de pirogue depuis Régina pour atteindre la première station scientifique et encore 3 heures de trek pour rejoindre le deuxième camp !
Nous aimons particulièrement découvrir comment se déroule le quotidien de cette station scientifique, qui, en temps normal, est fermée au public. On reste aussi très curieux de pénétrer dans le monde de la recherche scientifique et d’entre-apercevoir, ainsi, quelques sujets d’études qui se déroulent dans ces équipements d’exception (étude des oiseaux, des grenouilles, etc.). On se prend même à rêver d’être à la cime du « dispositif d’accès permanent à la Canopée » (trois grands pylônes d’acier reliés entre eux par des câbles, permettant de réaliser des observations de la faune et flore au-dessus de la canopée)…
Quand l’orpaillage illégal entre en jeu
Si ce n’est le « meurtre », le tableau de la forêt serait idyllique… mais, c’est là qu’entre en jeu, LE problème majeur de la Guyane, celui de l’orpaillage. Avec les sites d’exploitations minières illégales disséminés un peu partout dans la forêt guyanaise, il n’y a plus tellement de « site aussi éloigné que possible de l’influence directe des activités humaines ». Un nouveau danger devrait peut-être s’ajouter à liste de ceux connus des chercheurs en séjour dans les Nouragues : celui de tomber nez à nez avec un groupe d’orpailleurs…
Là encore, l’auteur connaît bien son sujet et dessine parfaitement l’univers de ces pauvres chercheurs d’or brésiliens, empêtrés dans leurs rêves d’Eldorado et qui se réveillent coincés dans une mine d’or perdue au milieu de la forêt et aux mains de patrons peu scrupuleux. Toute personne qui réside en Guyane connaît ces histoires par cœur, mais elles continuent toujours autant de nous glacer le coeur…
Pour ce qui est de la trame « policière » du roman, on apprécie de retrouver les mêmes fonctionnaires menant l’enquête, tous en proie à des problèmes existentiels, voir parfois, des plus triviaux du quotidien, ce qui les rend si humain et si proche de nous ! D’ailleurs, la devise « ce qui se passe en forêt, reste en forêt », qui nous a donné bien des frissons dans un premier temps, est mise à mal grâce au professionnalisme et à la ténacité de ces flics zélés !