La Guyane abrite le port spatial de l’Europe
Un des attraits de la Guyane réside évidemment dans l’implantation du « port spatial de l’Europe », à Kourou. Cette dénomination aux connotations plutôt futuristes fait pourtant bien partie de la « marque » du Centre spatial guyanais (CSG). D’ailleurs, on ne peut qu’être étonné de voir cohabiter sur un même territoire, une activité à très forte valeur ajoutée et hautement industrielle, avec d’autres activités dites de subsistances, comme les pratiquent encore de nombreuses communautés humaines à l’intérieur des terres guyanaises, en plein cœur de la forêt amazonienne.
Suite à l’indépendance de l’Algérie, qui accueillait alors le CNES, le gouvernement français est à la recherche d’un nouveau site. C’est en 1964 que le choix se porte sur la Guyane qui cumule de nombreux atouts, comme le rapporte le site internet du CSG :
- Une très large ouverture sur l’océan Atlantique favorise toutes les missions spatiales, des lancements aussi bien vers l’Est (pour l’orbite géostationnaire) que vers le Nord (pour l’orbite polaire) avec un minimum de risque pour la population et les biens alentour.
- La proximité de l’équateur (5,3° de latitude Nord) qui permet de bénéficier au maximum de l’effet de fronde (énergie fournie par la vitesse de rotation de la terre autour de l’axe des pôles) ; cet effet procure au lanceur un complément de vitesse de l’ordre de 460 m/s.
- Faible densité de la population (45000 habitants en 1964 sur un territoire de 91000 km2, soit 1/6e de la France), fortement concentrée sur la bande côtière.
- Possibilité d’installer sur les collines environnantes des moyens de poursuite (radars et antennes de télémesure).
- Site bien ventilé et un climat très supportable malgré sa position équatoriale.
- Zone à l’abri des cyclones et des tremblements de terre.
- Infrastructures existantes relativement simples à adapter aux besoins du futur centre spatial (routes, aérodrome, ports, télécommunications, etc.).
Le centre spatial Guyanais est un acteur économique extrêmement important pour le territoire. Outre les emplois directs (1 700 salariés) et indirects qu’il génère (estimés à 7 000), il contribue également au développement de la Guyane par l’intermédiaire de financement de projets territoriaux (« Mission Guyane » du CNES).
Le Centre spatial résolument ouvert au grand public
Malgré les protocoles de sécurité, le centre spatial reste largement ouvert au public. Des visites guidées et gratuites des pas de tirs sont proposées, sur réservation. Nous n’avons malheureusement pas pu encore en bénéficier, car elles sont interdites aux enfants de moins de 8 ans, pour des raisons de sécurité. Par dépit, nous nous sommes rabattus sur le Musée de l’espace construit à l’intérieur de l’enceinte du centre spatial. Malgré ses airs « rétro », il mérite quand même un détour.
En terme d’accessibilité au public, le Centre spatial met à disposition cinq sites d’observation des lancements, soit sur réservation (agami, jupiter, vénus et ibis), soit libre dans la limite des places disponibles (carapa). La salle Jupiter est la plus connue, car donnant sur le Centre des contrôles. Elle n’a pourtant pas la réputation d’être la plus pertinente pour observer les lancements. De toute façon, elle est très difficile d’accès, les places disponibles étant réservées en priorité aux sociétés propriétaires des satellites que transportent les fusées.
Nous avons testé le site d’observation CARAPA, que nous recommandons plutôt pour les lancements de fin de journée. Le site n’étant pas protégé, il peut faire y très chaud. Ce serait dommage d’avoir une insolation pour à peine cinq minutes de spectacle !
Les sites d’observation de Cayenne sont aussi bien que ceux de Kourou
Afin d’éviter les longues heures d’attente avant lancement depuis les sites d’observation de Kourou, sachez qu’il est tout à fait possible d’observer un lancement depuis Cayenne. L’expérience est tout autant extraordinaire. Il existe d’ailleurs plusieurs spots intéressants pour observer le départ d’une fusée.
La place des Amandiers est l’un des points d’observations les plus classiques. Son intérêt principal réside dans la présence d’un écran géant qui retransmet en direct toutes les opérations du vol. On est ainsi tenu informé en temps réel du compte à rebours du lancement. Ce qui peut valoir le coup lorsqu’il y a du retard voir même un report, cela évite d’attendre pour rien ! Des vidéos sont également diffusées après, détaillant la finalité des satellites envoyés dans l’espace. Pour les enfants, des lancements de fusées « faites maison » sont proposées par une association de vulgarisation scientifique. L’ambiance est plutôt sympathique. Le site s’est sensiblement amélioré depuis que la mangrove a déserté le bord de mer dans le centre de Cayenne. La vue est désormais extrêmement bien dégagée !
Le fort Cépérou est un point d’observation plus intéressant, d’abord, pour son côté intimiste. De plus, étant en hauteur, la vue sur le lancement est plus spectaculaire. Il est également possible d’observer les lancements depuis la plage de Rémire-Montjoly, qui reste le site d’observation le plus ludique. Nous avons enfin testé depuis l’hôtel désaffecté de la colline Montabo, qui constitue le meilleur spot, mais tout de même le moins sécurisé !
En fonction du temps, les conditions d’observation sont plus ou moins bonnes. Un ciel complètement dégagé est extrêmement rare, il est donc probable que la vue sur la fusée soit obstruée, à un moment ou un autre, par une épaisse couche de nuages. La chance est de notre côté lorsque nous arrivons à percevoir le décollage de la fusée et l’impressionnant « champignon » de fumée rougeâtre qu’elle engendre. Il est même possible de voir le détachement des booster de la fusée dans le ciel. Autre fait marquant : il y a bien deux ou trois minutes de décalage entre la vision de la fusée qui décolle et le son associé. D’ailleurs, il ne sert à rien de lever la tête au ciel lorsqu’on entend le bruit de la fusée : elle est déjà hors champs depuis belle lurette ! L’expérience de lancement la plus remarquable est celle de nuit, où la longue trace de la fusée dans le ciel illumine la nuit tropicale.
En tout, le spectacle du vol ne dure que quelques minutes, le lanceur Ariane 5 reste le plus impressionnant du fait de sa taille. Soyouz et Vega ne sont lancés depuis le CSG que respectivement depuis 2011 et 2012.
Comme il y a à peu près un lancement par mois, il est facile de pouvoir renouveler l’expérience !
3 comments