A la fin du XIXème, le gouverneur Loubère a dans la tête l’envie de se faire construire une résidence secondaire au bord de la mer. Sans doute était-il oppressé par l’urbanisation démentielle de Cayenne à l’époque, ou alors résider sur son lieu de travail lui pesait-il. Lors d’une déplacement dans l’Ouest du pays, il remarque à la pointe des Hattes, près d’Awala, une maison de l’administration pénitentiaire à l’abandon. La baraque n’a pas perdu de son charme malgré ses affectations précédentes (prison, asile) et il rentre à Cayenne avec une petite idée derrière la tête. L’époque est aux économies, et le gouverneur ne voulant pas ponctionner de trop le budget de la colonie, propose de démonter le bâtiment pour le faire reconstruire sur un terrain appartenant à l’État. Les frais sont ainsi minimisés et chacun y trouve son compte. La proposition est validée et il faudra trois ans pour la mettre en œuvre. En 1874, c’est la pendaison de crémaillère du chalet Bourda mais malheureusement, nous n’avons aucun écrit relatant la soirée.
Avec le temps, la résidence qui n’était que secondaire devient principale et les préfets succèderont aux gouverneurs. Lors de la départementalisation en 1947, le chalet Bourda est cédé au département mais il n’y a pas de procédure d’expulsion des occupants et ils y demeurent jusqu’à aujourd’hui.
D’un point de vue architectural, il s’agissait d’une maison sur pilotis avec des ouvertures permettant un effet Venturi pour rafraichir le chalet. Depuis, les pilotis ont été murés pour créer de nouvelles chambres tandis que toutes les ouvertures ont été obstrués pour mettre la climatisation. La maison du gardien, quant à elle, a acquis ses lettres de noblesse puisqu’elle accueille maintenant les présidents et ministres de passage en Guyane. Le gardien lui se retrouve à la porte (au sens propre).
Nous n’avons pas pu pénétrer l’intimité du préfet, nous contentant de rester dans le parc et de faire le tour de la maison. Ce qui frappe, c’est le manque de signes ostentatoires justement des ors de la république. Certes le chalet Bourda est beau tout en bois mais il n’y a rien d’extravagant : pas de moulure, ni de feuille d’or, pas de jardin à la française, etc… On est dans la simplicité, la république belle dans son dénuement et aussi un peu dans sa décrépitude il faut bien le dire. En espérant que le classement au titre des monuments historiques permettent de mettre ce patrimoine en valeur.