C’est en arrivant à Hong-Kong que nous avons eu notre premier contact avec la médecine traditionnelle chinoise (MTC). La ville regorge, en effet, de pharmacies traditionnelles vendant les “must” de cette médecine, vieille de quelques milliers d’années : intestins séchés de poissons, concombres de mer, yarchagumba (champignon chenille), etc. Alors qu’on se demande bien comment peuvent-être consommés toutes ces bizarreries, les revendeurs excellent en inventivité pour les présenter comme les mets les plus fins dans leur devanture. Il paraitrait que les chinois fortunés préfèrent se fournir à Hong-Kong et à Macao se défendant ainsi des risques de faux, qui sont monnaies courantes en Chine.
Karen, une chinoise que nous avons rencontré par l’intermédiaire du réseau couchsurfing, nous a déchiffré quelques uns de ses “rites initiatiques”. Tout d’abord, un des éléments thérapeutiques de la MTC est la concoction. Ce qui nous semblait être des “aliments” ne sont en fait pas consommé, mais leur qualité médicinale est utilisée sous la forme d’une infusion. Voilà qui nous rassure quelque peu, cependant on ne veut pas pour autant imaginer le gout et l’odeur de la boisson… Nous reviennent en mémoire tous les dessins animés ou autres films mettant en scène des sorcières en train de préparer leurs potions maléfiques en utilisant tout un tas d’ingrédients les plus incongrus… Nous avons aujourd’hui la conviction que leurs auteurs se sont inspirés de la médecine chinoise!
Les autres éléments thérapeutiques sont le massage, l’acupuncture, la diététique (d’où l’importance de manger sainement pour les chinois) et la gymnastique (voilà qui explique le taux de fréquentation des parcs en Chine!). Sans comprendre l’ampleur de la philosophie qui soutient cette médecine, nous saisissons déjà l’importance qu’elle accorde à la prévention des maladies et à l’amélioration de la qualité de la vie.
L’apogée de notre rencontre avec la MTC fut à Canton, qui possède le plus grand marché de pharmacopées traditionnelles de Chine! Il est tout simplement impressionnant. Même s’il s’est, à ce qu’on nous a dit, aseptisé depuis le tsunami de modernisation qui a déferlé sur la Chine et ses quartiers populaires ces dernières années, il n’en demeure pas moins incroyable pour les novices que nous sommes… Ce marché est une véritable caverne d’Ali-baba! On y trouve des tonnes de loufoqueries (tiens dans le dictionnaire des synonymes, à “bizarrerie” on me propose “chinoiserie”…) sur des surfaces gigantesques. Pas moins de 3 centres commerciaux sur 4 étages, sans compter la colonisation des ruelles alentours par des vendeurs ambulants, malgré les efforts des autorités pour épurer l’endroit. On aura passé des heures à arpenter ces petites boutiques pour y découvrir, entre autres : des pénis de cerfs, des bois de cervidés, des pattes de biches, des énormes champignons, des racines de gingembre, des étoiles de mer, et tellement d’autres choses dont nous ne connaissons pas le nom…Notre scepticisme originel, lié à notre attachement pour la médecine occidentale, a été rapidement balayé par notre curiosité pour ce monde parallèle.
Une autre controverse freinait notre enthousiasme, celle ayant trait à la préservation de la biodiversité. Durant notre séjour à Singapour, notre porte d’entrée en Asie, la présentation de la MTC s’était plutôt faite sous l’angle de la menace écologique que des bienfaits sur la santé. En effet, la pharmacopée chinoise repose, entre autre, sur des organes d’espèces en voie d’extinction (comme la bile d’ours, les moustaches ou les os de tigres, etc.). Quoiqu’il en soit le plaisir des yeux est parfois plus tenace que la conscience écologique…
La médecine traditionnelle chinoise serait également à l’origine de nombreuses traditions qui occupent encore la vie quotidienne des chinois. A l’occasion d’un repas chez un copain de Guillaume expatrié en Chine depuis 10 ans, marié à une chinoise et récemment père de deux jumeaux, nous aurons eu un aperçu des règles à respecter après l’accouchement. Sachez qu’une femme qui vient d’accoucher ne peut pas toucher de l’eau (et donc se laver) pendant 46 jours et ce, pour éviter les infections liées à l’eau. De plus, elle doit rester dans son lit, pendant ce même laps de temps, pour se reposer de l’accouchement, car toute son énergie a été consommée pendant l’évènement. Sa mère ou une nounou est chargée de s’occuper du nouveau né. Le seul lien autorisé entre la mère et le nouveau-né est évidemment l’allaitement. Enfin, le nouveau-né n’est pas censé sortir de la maison avant ses 100 jours! Et ce, pour éviter qu’il ne tombe malade. Une grand fête est d’ailleurs organisée à l’occasion de ses trois mois, l’enfant ayant désormais le statut de bébé et non plus de nouveau-né. On imagine l’importance du taux de mortalité infantile qui a pu exister dans le passé pour que de telles pratiques demeurent! Après avoir pris connaissance de cette information, il nous a semblé ne pas apercevoir de nouveaux-nés dans la rue…
D’autres copains français expatriés en Chine ont carrément été interviewé par le service communication de l’hôpital chinois dans lequel leur fille est née pour qu’ils expliquent l’intérêt d’un “accouchement naturel”! A priori, en Chine, c’est l’accouchement par césarienne qui est la mode, et ce pour que l’enfant naisse à une date qui lui porte chance. On ferait appel à des voyants pour déterminer la date idéale de l’accouchement. Les statistiques sont édifiantes: plus de 50% de chinoises choisiraient une césarienne. Cependant d’autres facteurs pourraient aussi expliquer cette préférence comme l’absence de péridurale et de préparation à l’accouchement (source : le blog des copains expatriés en Chine).
Pour le reste, il faut avouer que l’on ne comprend pas grand chose aux concepts de cette médecine qui est avant tout une philosophie de vie. En tous les cas, elle demeure bien ancrée dans la société chinoise avec ses universités et hôpitaux de médecine chinoise et ses incroyables pharmacies!