Voyager en train en Chine

Pour parcourir les milliers de km qui nous séparaient de Canton à Haerbin, le train chinois aura été un précieux moyen de transport!
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couchettes douillettes

Le réseau ferroviaire chinois est l’un des plus grands au monde avec plus de 70 000 km de voies. La qualité et la vitesse des trains ont considérablement évolué ces dernières années. Les “bullet train” (l’équivalent de notre TGV) sont apparus, reliant Pékin à Shanghai en seulement 4 heures pour 1 500 km. Le train le plus haut du monde relie, depuis 2006, la province autonome du Tibet au reste du monde. Et sur toutes les autres lignes, de nouveaux trains ont été mis en service, plus rapides, plus propres, plus clinquants.

N’ayant pas utilisé le train depuis l’Inde, nous avons sauté sur l’occasion de renouer avec notre moyen de transport préféré. Et on en aura bien profité! Pendant notre séjour chinois, nous aurons donc passé en tout 76 heures de train, dont 5 nuits en couchette. Pourtant, nous sommes loin d’avoir parcouru l’intégralité de ce vaste pays: ces longues heures de train n’auront été que des escapades en terres chinoises…

La première étape consiste à acheter son billet de train, ce qui n’est pas très compliqué puisque les numéros de train sont en alphabet romain et les horaires et dates, en chiffres arabes. Il suffit d’avoir repéré sur internet le numéro de train et le tour est joué! Surtout ne faut pas s’effrayer du monde dans le bureau de vente, il y a la queue mais cela va assez vite.

La deuxième étape consiste à rentrer dans la gare! Prévoir un peu de marge, car tous les bagages sont passés aux rayons X et tous les passagers sont légèrement fouillés. Les tickets de train sont aussi contrôlés, sans doute pour éviter les squattages de gares intempestifs. Une fois entré dans l’antre de la bête, il suffit de repérer la salle d’attente assignée par numéro de train et attendre que les portes du quai s’ouvrent à vous, une demi-heure avant si le train est déjà à quai ou quelques minutes avant si la gare ne constitue qu’une escale. Dans certaines gares, les salles d’attentes sont archi-bondées et elles ressemblent un peu à des camps de réfugiés: des familles entières sont assises par terre avec des kilos et des kilos de bagages, des gens sont allongés sur les sièges en chaussettes, en train de dormir malgré le brouhaha ambiant, le tout signifiant une attente interminable. D’autres gares, comme celle de Shanghai, ressemblent à des halls d’aéroport, tellement elle est gigantesque. On a alors l’impression d’être des petites fourmis perdues au milieu d’un espace bien plus grand que soi!

Quand les portes du quai s’ouvrent, il faut jouer des coudes au milieu de la foule pressée, comme si le premier arrivé était le premier servi, alors que les places sont réservées. A l’entrée du wagon, une hôtesse accueille les passagers, tout en contrôlant une nouvelle fois le billet, et l’échange contre une carte magnétique dont on n’a pas compris son objet. En tous les cas, cela oblige l’hôtesse à se souvenir de votre arrêt car elle doit récupérer cette carte, ce qui économise l’angoisse de rater sa gare.

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wagon-couchette

Ce n’était pas sans une certaine appréhension que nous avons franchi la porte de notre premier train, qui allait être notre “maison” pendant les 26 heures de trajet qui nous séparait de Canton, au Sud de la Chine et Nankin, au Nord. La distance à parcourir était de 1200 km! Cette petite frayeur était simplement due au nom de la classe que nous avions acheté pour économiser sur le prix du billet : “hard sleeper” (couchette dure). On s’imaginait déjà devoir dormir sur des planches de bois… Au lieu de cela, notre couchette était très douillette. Accompagnée d’un oreiller et d’ une bonne couette bien chaude, on se sentait comme dans un vrai lit! La 3ème classe n’est pas compartimentée, le wagon se compose donc de rangées de 6 couchettes (3 par 3) séparée par un mur. Il faut bien choisir sa couchette: celle du bas permet de s’assoir (les couchettes ne se plient pas en journée) tandis que celle du milieu et celle du haut obligent à une position couchée en permanence. Heureusement, le couloir permet aux moins chanceux de s’assoir pendant la journée avec table et sièges dépliants.

Notre première expérience restera la plus marquante, car la plus longue, d’une part, et d’autre part, nous aurons voyagé de jour. Nous passerons donc les premières heures du trajet à admirer le paysage: au sortir de Canton, le climat tropical nous offre à regarder les fameuses montagnes chinoises karstiques aux formes fantaisistes et recouvertes de forets. On les retrouvera par la suite sur toutes les peintures miniatures des palais de Pékin. Mais, peu à peu, le paysage deviendra plat, et se composera exclusivement de zones urbaines, comme pour nous rappeler que nous avons choisi de visiter la côte urbanisée de la Chine et que, par conséquent, les mystères de la campagne chinoise nous resteront fermés. Se succèdent ainsi barres d’immeubles, cheminées d’usines et grues de chantiers… Sous une épaisse couche de nuages (dont on ne sait pas s’il s’agit de pollution ou de mauvais temps), le paysage prend ainsi une teinte maussade et il se met à ressembler à celui que nous décrivait si bien Zola dans ses romans réalistes sur la révolution industrielle.

Nous détachons alors notre nez de la vitre pour nous intéresser à ce qui se passe à l’intérieur du wagon, d’où l’intérêt de ne pas être en compartiment! On peut alors profiter du spectacle de la vie quotidienne des passagers de trains chinois. Il y a d’abord le rituel de l’installation: on range où l’on peut ses sacs plastiques remplis de toutes les victuailles que l’on grignotera tout le long du trajet et que l’on partagera entre voisins de couchettes, puis on met ses pantoufles, et on va remplir son thermos d’eau chaude au samovar du wagon.

Chacun s’occupe comme il peut: il y en a qui passe leur temps à manger: pipas, pieds de poulet et autres réjouissances lyophilisées. D’autres s’endorment immédiatement et on ne les verra émerger qu’au moment des repas, comme s’ils avaient du sommeil à rattraper. D’autres encore, jouent aux cartes, lisent ou regardent des films. Enfin, il y a toujours de quoi s’occuper avec un téléphone portable! Pour notre part, nous sommes loin de ressentir l’ennui: entre les livres, la mise à jour de notre carnet de bord, la douce rêverie que nous procure le paysage et notre franche curiosité pour les autres passagers, nous ne voyons pas passer le temps!

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nouilles lyophilisées comme repas

Des gamins courent en pyjamas dans les couloirs du train, des grands-parents sont de corvée pour trimballer la petite dernière qui ne marche pas encore bien. Sans oublier le ballet, incessant, des vendeurs ambulants qui poussent inlassablement leurs petits charriots à roulettes: plateau-repas, serviettes, jeux de cartes, jeux de dominos, journaux, etc. on trouve de tout pour se restaurer ou pour s’occuper!

Dans l’ensemble, l’ambiance est calme, détendue et bon enfant.

Quant à nous, il faut bien avouer que nous passons inaperçu… Contrairement aux trains indiens, personne ne fait attention à nous, ni ne nous observe… Tout au plus avons-nous rencontré un jeune chinois désireux de pratiquer son anglais. En s’apercevant que nous n’étions pas anglophone, son intérêt pour nous s’est amoindri… Mais c’est alors que nous avons sorti notre arme secrète: le jeu de carte! Nos heures à arpenter les parcs chinois n’auront pas été vaines, nous aurons au moins compris quel était l’hameçon pour piquer la curiosité des chinois… A peine avions-nous disposé les cartes pour jouer, qu’une demi-douzaine de tête ont surgi du couloir et des couchettes au-dessus de nous, pour nous observer. Nous existions enfin! Evidemment, notre heure de gloire n’aura duré que quelques minutes, l’incompréhension devant les règles de notre jeu ayant vite réussi à vaincre l’intérêt des chinois pour les jeux de cartes…

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montagnes karstiques en miniature

A 22h, c’est l’extinction des feux, imposée par l’hôtesse de wagon, qui veille à la propreté du train et à l’organisation de la vie commune. Tout le monde est logé à la même enseigne, enfants comme grands! Il n’y a pas de lampes individuelles par couchettes pour les couches-tard. Tout le monde gagne alors sagement son lit et c’est la nuit noire jusqu’au petit matin!

Le jour nous réveille assez tôt (6h du matin) et c’est le va-et-vient de la toilette qui commence : la longue queue pour les toilettes et les lavabos, les raclements du gorge du petit matin. Pendant que l’hôtesse de train commence son ménage : à l’aide d’un ballet en paille, elle ramasse tout ce qu’elle trouve sur son chemin: chausson, fruits non consommés, magazine… Tout partira à la poubelle, déchet ou non!

Enfin… c’est presque avec regret que nous quitterons ce confortable foyer…

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11 comments
  1. Guillaume, combien d’heures arriviez vous à la gare avant le départ de votre train ? 4 heures au moins vu ce que vous racontez !! Pas trop le stress ?? 🙂
    c’est vrai que les couchettes ont l’air méga confortables !

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