La fête des morts à Cayenne se vit différemment qu’en métropole
Vivre la Toussaint en Guyane est une expérience assez étrange car elle nous fait découvrir un autre rapport à la mort et nous questionne, du même coup, sur nos propres traditions face à la mort.
Pour vivre pleinement cette fête des morts, nous avons opté pour une balade dans le cimetière de Cayenne le 31 octobre au soir, ouvert pour l’évènement. Cette sortie constitue, en prime, une bouffée d’air frais, dans la chaleur étouffante de ce mois d’octobre, le plus chaud de la saison sèche.
Pour l’occasion, le cimetière se pare de multiples guirlandes chatoyantes qui éclairent l’épaisse nuit tropicale d’une lumière douce et tamisée et permettent aux nombreux pèlerins de se recueillir sereinement sur les tombes de leurs aïeuls.
L’ambiance y est vraiment particulière à la fois empreinte de mysticisme, de joie de vivre et de douce tristesse.
Quelques jours avant, les tombes sont nettoyées et décorées
Le rituel commence toujours par nettoyer la tombe ou le caveau familial : quelques jours auparavant, les familles payent souvent des « djobeurs » pour rénover les sépultures : menus travaux d’embellissement, de peinture, de désherbage, de fleurissement, etc. L’objectif est que la tombe soit parfaitement présentable le jour de la fête des morts. La décoration des tombes est ensuite renouvelée et ce sont toujours des fleurs aux couleurs les plus vives qui trouvent naturellement leur place sur les sépultures. Petit détail qui nous a étonné : les fleurs sont en plastique, certainement pour que la fête perdure bien au-delà du mois de novembre ou plus crument pour des raisons financières. On peut aussi imaginer que cela empêche la prolifération de moustiques porteurs de nombreuses maladies sous les auspices tropicaux.
Quoiqu’il en soit, la journée, le cimetière resplendit de milles couleurs comme une provocation vis-à-vis du soleil ardent de ce mois d’octobre qui a tendance à neutraliser toutes velléités de teintes.
Le soir du 31 octobre, on y ajoutera délicatement de nombreuses bougies comme pour éterniser ce moment de commémoration.
A la tombée de la nuit, vers 18h, les allées et venues dans le cimetière commencent à devenir incessantes, il y a énormément de monde et la foule déambulent tranquillement. Le brouhaha est permanent mais tout à fait respectueux des circonstances.
Le jour J, le cimetière fait salle comble
Les personnes sont habillées de leurs plus belles tenues de soirée, car il s’agit autant d’honorer la mémoire de ses proches que de se rendre à un rendez-vous mondain. Tout le monde se salue, tout le monde se connaît et il est aussi important de se montrer.
La foule compacte s’éparpille dans les allées pour peu à peu former des petits cercles intimes autour des tombes. La soirée de célébration peut enfin commencer, accompagnée souvent de victuailles.
En spectateur extérieur à cet évènement emblématique de la culture créole, nous flânons lentement de tombe en tombe et observons là, une famille remplie de joie autant de se retrouver que de se remémorer quelques bons souvenirs de leurs proches disparus, là-bas, une personne âgée en plein recueillement, assise sur la tombe de son défunt époux, tout en murmurant, les yeux à demi-clos, ce qu’on imagine être de douces prières d’amour.
Voilà ce qui nous frappe le plus pendant cette étonnante fête, ce rapport à la mort à la fois festif et mélancolique, où il n’est pas indécent de faire état de ses émotions en public mais plus encore où le mot « mort » n’est pas toujours synonyme de tristesse et de douleur mais tout simplement d’heureuses retrouvailles familiales où la personne disparue continue à vivre grâce la mémoire de ses proches.
3 comments
Intéressant de voir ces différences culturelles lors de la fête des morts. Au Japon, c’est au mois d’Août qu’elle se déroule.
tunimaal Articles récents..Bonjour en japonais, mais aussi bonsoir et bonne nuit
Ah au mois d’août? Intéressant!