Les maisons de clan chinoises de Malaisie

La réussite économique de la diaspora chinoise, très importante en Asie du Sud-Est, repose en partie sur la vitalité des maisons de clan chinoises.
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Un dragon à l'affut

Les maisons de clan chinoises, une clé pour comprendre la réussite économique de la diaspora chinoise de l’Asie du Sud-Est

Notre séjour à Penang, une ile au Nord de la Malaisie aura été l’occasion de découvrir les fameuses “kongsi” (maison de clan chinoises), si caractéristiques des diasporas chinoises de l’Asie du Sud-Est. Il s’agit du plus ancien foyer d’immigration chinoise et il regroupe 80% de la diaspora chinoise dans le monde (y compris les chinois ayant la nationalité du pays d’accueil). Nous constaterons que sur le continent, la diaspora en Malaisie est surtout citadine et basée sur le commerce, d’où les multiples boutiques chinoises en tout genre qui attire le regard et attise la curiosité du voyageur.

La ville de Penang regorge de maisons de clan chinoises, car l’installation du comptoir commercial anglais au XVIIIème siècle a attiré de nombreux candidats chinois à l’immigration, séduits par le port commercial prospère de l’île et la politique d’attribution des terres des anglais (“vous appartient ce que vous défrichez!”). Reléguées au passé, ces maisons sont aujourd’hui ouvertes aux curieux qui pourront enfin découvrir ce qui se cache derrière ses portes majestueuses.

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Un personnage inquiétant

Nous avons farfouillé la maison de clan chinoise de Khoo (du nom du clan), qui est la mieux conservée de Georgetown mais aussi la plus documentée sur son histoire, ses fondateurs et l’organisation de la vie communautaire. Sa visite nous aura donné quelques unes des clés pour comprendre la réussite économique de la diaspora chinoise de l’Asie du Sud-Est. Les monde des affaires chuchoteraient même que la Malaisie doit la vigueur de son développement économique aux chinois…

Les maisons de clan chinoises reposent sur un système d’entraide entre les migrants

Mais à quoi servent donc ces maisons? A unifier le clan, à s’entraider, à prendre soin de chaque membre de la communauté dans le besoin. Le champ d’action du clan est large: du logement, aux bourses pour étudier (voir la gestion en directe d’écoles et d’universités pour ses descendants!), en passant par la “tontine” (prêt financier). Les réussites universitaires seront d’ailleurs fièrement affichées par des plaques commémoratives dans les différentes salles de la maison. Elles servent aussi à accueillir le nouvel immigrant, à le loger, le nourrir, lui transmettre les clés d’une intégration réussie, pendant tout le temps nécessaire avant la stabilisation de sa situation économique.

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Le temple

Nous comprenons alors le secret de la réussite économique des diasporas chinoises: la solidarité et le système d’entraide. Il suffit qu’un des membres de ce clan, resté en Chine, se décide à sauter le pas de l’émigration alors il sera accueilli dans ce petit bout de Chine comme s’il était encore là-bas. Son émigration ne sera plus une épreuve, ni un déchirement de l’âme et du cœur, mais une continuité de sa vie d’avant. Évidemment, le clan exige des contreparties, comme celui de participer à l’organisation communautaire, notamment en faisant des donations pour la construction des différents édifices de la maison. Les donations sont fructifiées pendant des dizaines d’années avant leur utilisation concrète. Il faut donc faire confiance en la solidité du clan pour que l’argent de côté serve effectivement à son objet initial.

Le temple est au centre de tous les regards

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Les tablettes funéraires des ancêtres

La maison sert enfin à honorer les ancêtres, grâce à la présence d’un temple. Cette pratique ancestrale chinoise repose sur la croyance suivante: lorsqu’une personne meurt, elle continue à vivre sous la forme d’un esprit ou d’un fantôme qui continue à avoir une influence sur son clan. Il faut donc honorer ses ancêtres comme s’il était encore vivant dans une posture de piété filiale.

Voila qui explique certainement pourquoi les chinois sont aussi fort pour retracer leur généalogie. Grâce au culte des ancêtres, aucun défunt parent ne pourra tomber aux oubliettes! Cette notion de clan est d’ailleurs difficile à comprendre pour nous autres européens, dont la lignée familiale repose sur le cercle familiale restreint. Elle désigne les descendances filiales de toutes les personnes portant le même nom. Pour ce qui concerne le clan “Khoo”, la généalogie retrace plus de 600 années de descendance, soit 47 générations!

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porte d'entrée

La maison de clan chinoise est un ensemble d’édifice servant de lieu de culte (le temple), de divertissement (un hall d’opéra), de réunion (le meeting hall) et d’habitat (les logements). Mais c’est le temple qui est au centre de tous les regards, par sa richesse architecturale et l’émerveillement que procure ses imposants personnages chinois, ses lions gardiens du temple, ses dragons à l’affut sur le toit. Il y a plusieurs salles dédiées aux différent cultes, mais la plus impressionnante reste celle où sont conservées, avec ferveur, les tablettes funéraires des ancêtres.

Même si aujourd’hui ces édifices semblent d’un ancien temps, qu’en est-il de la maison de clan chinoise “contemporaine”, celle qui n’est pas ouverte au public? Et, combien en recense-t-on à travers le monde?

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2 comments
  1. J’ai beaucoup aimé votre article! J’avais entendu parler du culte des ancêtres (comme tout le monde j’imagine) mais pas des maisons de clan. Est-ce que les chinois sont les seuls à avoir ce genre d’organisations à l’étranger? Il s’agit bien de particuliers qui s’organisent spontanément et non pas d’administrations?
    Lucie Articles récents..Quelques jours à Vienne

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